D’où vient l’austérité salariale ?
Ce que nous appelons l’austérité salariale, c’est-à -dire l’affaiblissement du pouvoir de négociation des salariés qui conduit à la déformation du partage des revenus au détriment des salariés, à la faiblesse des hausses de salaire et de l’inflation, a débuté dans les pays de l’OCDE à la fin des années 1970 au Royaume-Uni, puis est apparue aux É tats-Unis (années 1980), au Japon (années 1990), en Allemagne (début des années 2000), en Espagne (depuis la crise de 2008). Seules la France et l’Italie, malgré quelques réformes du marché du travail ont échappé à l’austérité salariale. Pourquoi les gouvernements, à partir de la fin des années 1970, ont-ils voulu flexibiliser les marchés du travail, freiner les salaires ? On peut identifier plusieurs motivations des gouvernements : une motivation idéologique : comme le met en avant M. Friedman dans les années 1960, il faut lutter contre tous les monopoles, y compris les monopoles syndicaux ; précisément les dégâts causés par l’excès de pouvoir des syndicats (clauses de « closed shop » au Royaume-Uni, aux É tats-Unis) qui donnent aux syndicats le contrôle des marchés du travail, réduisent la productivité et l’efficacité de l’économie, génèrent des gr è ves incessantes ; l’apparition d’une exigence de rentabilité élevée du capital pour les actionnaires alors que la productivité et la croissance ralentissent, ce qui ne peut alors s’obtenir que par la compression des salaires ; la mise en place progressive du libre-échange, qui met en concurrence par les coûts les pays, d’abord entre les pays de l’OCDE, puis avec les pays émergents ; la volonté de lutter contre l’inflation, attisée à la fin des années 1970 et au début des années 1980 par les hausses des prix du pétrole et par l’indexation des salaires sur les prix. Toutes ces raisons ont poussé presque tous les pays de l’OCDE, les uns après les autres, à choisir l’austérité salariale.