Utilities : Espagne : vers une régulation financière des réseaux d’électricité et de gaz ?
En Espagne , dans une double circulaire publiée en début de mois, l’autorité de la concurrence, la CNMC a évoqué l’introduction possible de ratios de crédit recommandés pour les opérateurs d’infrastructures régulées dans l’électricité et le gaz . Dans sa détermination des ratios de crédit recommandés, la CNMC a suivi une double approche, à travers i / la fixation implicite d’un objectif de notation pour les opérateurs concernés (catégorie simple A) et ii/ l’extrapolation des valeurs bornes de l’observation des ratios des différents opérateurs régulés des secteurs électrique et gazier à partir d’une moyenne générale au sein de chaque secteur et d’une moyenne de 75% des valeurs relevées au sein de l’échantillon considéré. Si elle ne détaille pas les situations individuelles des opérateurs concernés (principalement REE et les filiales de distribution d’Endesa, Iberdrola et Naturgy dans le secteur électrique, Enagas , Madrilena Red de Gas - MRG, NortegGas , Redexis et la filiale de distribution de Naturgy dans le secteur gazier), la CNMC met en évidence une situation plus tendue dans le gaz que dans l’électricité , avec des ratios de crédit moyens moins bons et surtout des moyennes calculées à partir de 75% des valeurs relevées au sein de l’échantillon considéré parfois supérieures aux valeurs recommandées. Il nous a semblé opportun d’apprécier la situation individuelle des principaux acteurs des infrastructures régulées dans l’électricité et le gaz en Espagne sur la base des ratios DN/EBITDA à fin 2017. Alors que la filiale de distribution électrique d’Endesa et REE affichent des leviers modérés (respectivement 1,6x et 3,2x), seul Enagas affiche dans le secteur gazier un ratio en ligne avec le niveau recommandé par la CNMC (≤6x) . Les autres acteurs du secteur gazier, tous opérateurs de réseaux de distribution, MRG, Nortegas et Redexis affichent des leviers supérieurs à 6x. Il n’est pas anodin de relever que ces trois opérateurs sont détenus par des investisseurs financiers, alors que leurs pairs dans les activités de transmission, Enagas et REE, qui ont fait l’objet d’une introduction en bourse, ont conservé un actionnariat partiellement public (respectivement 5% et 20%). A ce stade, les circulaires publiées par la CNMC et qui font l’objet d’une consultation publique ouverte jusqu’au 25 février n’ont aucune portée règlementaire. Notre compréhension des documents rendus publics est que pour l’instant, l‘autorité de la concurrence ne vise à introduire aucune règlementation contraignante. On peut toutefois s’interroger sur les intentions réelles de la CNMC. Dans cette perspective, la diffusion des circulaires et le lancement d’une consultation publique pourraient s’interpréter comme un moyen pour la CNMC de « sonder le terrain », l’étape suivante pouvant par exemple prendre la forme d’une recommandation à destination du gouvernement en vue d’une production règlementaire/législative spécifique. Dans ce cas, l’Espagne suivrait le chemin du Royaume-Uni , avec l’émergence d’une régulation financière dans les secteurs électrique et gazier visant à garantir la réalisation des dépenses de maintenance et des investissements nécessaires au bon fonctionnement des réseaux. De telles évolutions seraient bénéfiques à la qualité de crédit du secteur. Pour les trois distributeurs de gaz précités, cette évolution impliquerait des mesures spécifiques comprenant la redéfinition de la politique de dividende et/ou une injection de capital.